Le corpoème est une poésie inventée par Jean Sénac, émanant de l’expérience physique. C’est le corps en tant que poème et le poème en tant que corps. Si le terme correspond à l’expérience particulière de Sénac, elle peut servir à identifier un ensemble de poètes pour qui le corps, que ce soit comme entité physique, politique, sexuelle, formait la base de l’experience poétique. Loin d’être une activité purement linguistique, la poésie devient un langage du corps. Cela me fait penser à tout une série de poètes américains, Walt Whitman, Allen Ginsberg, Charles Olson, pour qui le corps devenait un terrain de revendication et de réalité poétique. Cela se retrouve également dans la poésie de Pasolini, Lorca, Reinaldo Arenas, terrain de revendication politique et d’identité sexuelle. Réaction contre une poésie intellectuelle, cette poésie émanant du corps prend souvent la cause du peuple, des exclus, des déshérités, contre la dictature et l’autoritarisme sous toutes ses formes. Le poète devient la voix des déshérités, puisque lui-même tient le rôle de l’exclu, porte-parole souvent dangereux des peuples réprimés.